
Numériser le tourisme. Gérer les flux de visiteurs. « Tracer » mais – pas de panique – anonymement. Les données issues de nos téléphones portables et autres se révèlent à nouveau précieuses.
En partenariat avec Proximus, le cabinet de la ministre du Tourisme Valérie de Bue (MR) et Visit Wallonia ont effectivement mis en place un projet pilote de gestion des fréquentations à l’abbaye de Villers ainsi qu’aux Lacs de l’Eau d’Heure afin d’améliorer la gestion des visiteurs sur place.
« Il y a un gros travail à faire sur la numérisation du tourisme. Il faut, pour cela, gérer les données et avoir des retours précis, depuis le terrain« , commente Jean-Philippe Lombardi, attaché de presse de la ministre.
« Grâce aux données du réseau téléphonique, on peut recouper, de manière anonyme, les informations et voir combien il y a de touristes, de quelles régions ils proviennent, combien de temps ils restent, quels sont les jours où il y a le plus de fréquentation, est-ce qu’ils logent sur place, etc. Grâce à cela, on fait une cartographie des zones ‘chaudes’ ou ‘froides’, afin de renforcer l’accueil des touristes, de l’améliorer. On peut voir l’offre de logements par exemple et l’adapter si besoin« , précise-t-il. « Les données sont agrégées, sans lien direct. On ne relie absolument pas les touristes à leur numéro de téléphone ou leurs cartes bancaires, d’ailleurs c’est interdit, mais on recoupe simplement des indicateurs de présence« , précise-t-il.
Une anonymisation des données qui tient à cœur à Proximus, qui insiste : « Les données groupées sont issues de téléphones connectés sur le réseau. On peut savoir d’où vient le téléphone mais pas à qui il appartient. C’est contrôlé scrupuleusement« , précise Haroun Fenaux, le porte-parole de Proximus. « Au-delà de l’accueil, les données peuvent permettre d’adapter les langues affichées si besoin également« , ajoute-t-il, si, par exemple, on constatait une forte fréquentation de touristes issus d’un pays particulier.
« Nouveau » business
« Le projet s’étale de juillet à septembre et on verra si on l’étend à d’autres sites par après. Des sociétés dans l’événementiel ont montré un intérêt« , détaille le porte-parole. Proximus, qui multiplie ses offres de services au-delà des télécoms, développe ce genre de projets depuis quelques années déjà et un département business y est consacré. Le Tour de France, lors de son passage à Bruxelles il y a deux ans, avait d’ailleurs fait appel à l’opérateur pour anticiper les mouvements de foule. « Pour le moment, c’est un modèle descriptif« , qui rend compte de la situation, ajoute Haroun Fenaux, « mais avec le développement de l’IA (intelligence artificielle, NdlR), il sera probablement possible de construire des modèles prévisionnels à l’avenir« , se réjouit-il.
« Il y a l’aspect macro« , avec la récupération des données du réseau, c’est-à-dire les téléphones connectés aux antennes relais, « mais il y a également l’aspect micro« , approfondit Frédéric Lhostte, qui dirige les solutions IoT (Internet of Things, les objets connectés) et analytics chez Proximus.
« Sur le site de l’abbaye de Villers, on a donc pu disposer quelques capteurs qui fonctionnent sur batterie et rechargés à l’énergie solaire. Il y en a plusieurs, dont des dispositifs infrarouges pour compter les personnes entrant dans le lieu et celles sortant, etc.« , explique-t-il. Un écran affiche dès l’entrée les données et permet aux gens d’avoir connaissance de la fréquentation du site, entre autres.
Et pour gérer les flux pendant la crise ?
Le service de Proximus n’est pas à proprement parler destiné à la gestion des foules en rapport avec le Covid « mais nous travaillons avec Sciensano depuis le début de la crise », avance Frédéric Lhostte. Effectivement, les données liées à la mobilité ont permis à l’Institut scientifique de santé publique d’établir des graphiques de fréquentation par provinces en fonction des différentes mesures de restrictions ou d’assouplissements et donc permettre de prendre des décisions plus efficaces et plus rapides. « Les données sont conservées maximum trois mois, subissent un ‘hachage’ (sorte de cryptographie mais ne permettant pas, ici, de récupérer les données de base, NdlR) et elles sont totalement anonymes« , confirme-t-il.